Refondre un intranet ? D’abord, écouter ceux qui le subissent.

Refondre un intranet, sur le papier, c’est simple. On pense arborescence, modules, SharePoint, pavés d’actu, moteurs de recherche.

Mais dans la vraie vie, un intranet, ce n’est pas un outil. C’est un révélateur d’irritants, un concentré de frustrations et de dysfonctionnements trop longtemps tolérés. Et c’est surtout une occasion : celle de remettre les usages au centre et de construire un outil collectif… à condition d’écouter, vraiment.

C’est ce que j’ai fait dans une mairie. Et voici ce que j’en retiens.

🎯 Le point de départ : un environnement éclaté, un besoin urgent de cohérence

Post-COVID, la mairie s’est équipée de licences Office 365. Teams s’est imposé partout, dans tous les sens, parfois pour le meilleur… souvent pour le flou.

Les agents travaillaient de chez eux, mais sans règles claires, sans gouvernance numérique. On multipliait les canaux, les outils, les fichiers, les irritants.

On m’a confié une mission : cadrer le futur portail Intranet, et poser les bases d’un environnement numérique structurant, transversal, cohérent.

Mais surtout : utile.

🧭 Étape 1 : écouter les irritants, pas les fantasmes de fonctionnalités

Mon premier réflexe n’a pas été de sortir un benchmark. J’ai commencé par descendre dans les services.

👉 J’ai organisé 5 ateliers terrain avec les 15 directions métiers de la mairie, du service scolaire à l’urbanisme, en passant par la police municipale et les RH.

Pas de formulaire type. Juste une question : “Qu’est-ce qui vous agace au quotidien ?”

Et là, le barrage a cédé.

“On ne peut pas accéder aux fichiers depuis l’extérieur.”
“On a plusieurs Teams pour le même sujet, personne ne sait lequel utiliser.”
“Impossible de savoir si un collègue est en congé.”
“Les procédures sont sur papier, donc on fait des scans qu’on range on ne sait où.”
“Réserver une salle, c’est un parcours du combattant Excel.”

Ce n’était pas des détails. C’était leur quotidien.

🔍 Lire entre les lignes : ce qu’ils n’expriment pas, mais qui bloque tout

Ce projet m’a vite fait comprendre une chose : les vrais besoins ne sont pas toujours exprimés. Ils sont parfois latents, enfouis, empêchés par l’habitude ou la résignation.

Ce que j’ai entendu, ce n’était pas seulement un besoin d’outil. C’était une demande d’accompagnement.

Un accompagnement pour structurer l’arborescence du portail,
pour éviter de sur-outiller,
pour migrer sans perdre 15 ans d’usages,
pour comprendre ce qu’on change et pourquoi.

Et surtout, un besoin d’être guidés, étape par étape.

Ce que les agents attendaient, ce n’était pas une plateforme. C’était qu’on leur tende la main dans la transformation.

🧱 Étape 2 : co-construire, structurer, et faire valider… ensemble

J’ai posé un cadre méthodologique clair, rigoureux, participatif. On a co-construit une vision partagée de l’intranet idéal.

Puis j’ai formalisé les besoins dans une macro-expression fonctionnelle, assez précise pour engager, mais assez souple pour rester ouverte aux solutions.

Pas de specs figées.
Pas de tunnel opaque.
Une feuille de route co-validée, service par service, pôle par pôle.

J’ai aussi animé des sessions d’arbitrage, parce qu’un besoin = une priorité. Et dans une mairie, arbitrer, c’est politique. Il fallait donc du fond, du consensus, et de la clarté.

🏗️ Le résultat : une architecture à 3 niveaux

Nous avons défini une architecture triptyque :

  1. Une façade commune : infos institutionnelles, actu interne, organigramme, annuaire, planning partagé.
  2. Une façade personnelle : suivi des congés, accès aux ressources RH, tâches à venir.
  3. Une façade publique : prise de RDV, services à la population, portail famille.

Un espace clair, vivant, fluide. Qui parle autant aux agents qu’aux élus. Et surtout : qui fait du lien. Parce qu’un intranet, bien fait, réunit plus qu’il n’affiche.

💡 Ce que j’en retiens

On peut déployer SharePoint en une semaine. Mais concevoir un intranet utile, ça demande autre chose :

✔️ De l’écoute sincère.
✔️ De l’analyse fine.
✔️ De la co-construction.
✔️ Et un vrai accompagnement du changement.

Et surtout, il faut accepter que les besoins métiers n’entrent pas dans des gabarits. Il faut aller les chercher. Les comprendre. Et les traduire.

Ce projet m’a appris qu’un bon consultant ne vend pas une solution. Il éclaire un chemin, et il marche avec ceux qui le prennent.